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Le 26 septembre 1973, le peintre Alfred Giess s’éteignait à Gray, en Haute-Saône.

Alfred Giess (1901-1973) fut un artiste singulier à divers titres. Malgré une carrière couronnée d’honneurs au sein des institutions officielles, il se sentit peu à l’aise dans les mondanités et ne fût jamais enclin à se mettre en scène. Dans une époque marquée par de profondes révolutions artistiques, il resta attaché aux leçons des maîtres du passé et à l’esprit artisanal du métier de peintre, tout en cultivant avec une obstination tranquille son style original.
 
L’association Alfred Giess, qui s’attache à conserver et valoriser l’œuvre de l'artiste, a souhaité marquer le cinquantenaire de sa disparition par une exposition numérique centrée sur la période 1924-1948.
 
Les bornes chronologiques choisies encadrent des moments qui ont profondément marqué les premières étapes de son itinéraire artistique : une ascension rapide depuis son entrée à l’École des Beaux-Arts de Paris en 1924, jusqu’à l’obtention du Grand prix de Rome de peinture en 1929, à l’âge de 28 ans, lui ouvrant la perspective d’une carrière brillante ; ses séjours à la villa Médicis à Rome (1930-1933) et à la Casa de Velázquez à Madrid (1934-1935) ; enfin, le repli à Champlitte, en Haute-Saône (1939-1948), jusqu’à son retour dans la capitale.
 
Cette modeste exposition n’a pas vocation à se substituer au travail des historiens de l’art, mais souhaite donner à voir, tant au grand public qu’aux spécialistes, une partie des œuvres d’Alfred Giess et du fond documentaire important que l’association peut mettre à la disposition des chercheurs. Nous espérons ainsi contribuer à faire découvrir ou mieux connaître son œuvre.

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Les premières années

“Je n’ai rien conçu d’autre. Je sentais que mon seul moyen d’expression serait de peindre”

Jules Alfred Giess est né le 21 avril 1901 à Morschwiller-le-Bas, près de Mulhouse (Haut-Rhin).

 

Seul garçon d’une fratrie de cinq enfants, il est issu d’une lignée d’artisans et d’ouvriers du textile, industrie florissante en Alsace depuis la fin du XVIIIe siècle. Lucien Giess, son père, est menuisier et s’adonne à la photographie à ses heures perdues.

 

Le jeune Alfred manifeste très tôt des dispositions pour le dessin. Pour concilier ce talent avec la nécessité de gagner sa vie, il commence à l’adolescence un apprentissage de dessinateur textile dans les ateliers mulhousiens d’impression sur étoffe.

 

En même temps que son travail, il suit les cours du soir de l’école de dessin de la Société Industrielle de Mulhouse (SIM), ouverts aux apprentis, ouvriers et enfants d’ouvrier des fabriques. Il a comme condisciple Lucien Weil, d’un an son cadet, avec lequel il entretiendra une longue amitié.

Si l’enseignement est conçu avant tout comme un support pour la conception de modèles destinés à l’impression de tissus et de papiers peints, l’école affiche comme principe “l’étude approfondie du dessin, qui est la base de l’éducation artistique et le point de départ de toutes les carrières qui en dépendent”.

 

Après la Première Guerre mondiale, Alfred Giess suit également les cours du peintre Robert Gilles Plantey, futur directeur de l’école puis conservateur du Musée des Beaux-Arts de Mulhouse. C'est de cette époque que datent les premières peintures dont nous avons la trace ; elles montrent déjà un goût affirmé pour le portrait, à en juger par ceux qu’il a réalisés de sa famille et de son proche entourage. 

Parallèlement, il apprend le français à l’aide d’un dictionnaire. Même s’il parvient à parler parfaitement la langue française, son maniement restera pour lui le fruit d’un effort constant. 

Portrait de Lucien Giess

Huile sur contreplaqué, 1921

Dimensions (cm): h : 55 ; l : 45

Collection particulière

©Philippe Dupas

En mai 1921, Alfred Giess est appelé sous les drapeaux et enrôlé dans l’armée du Levant pour servir en Syrie et au Liban. Tombé malade, il est rapatrié en France et affecté à Versailles. Il saisit alors cette opportunité pour se faire accorder l’autorisation de suivre des cours du soir à l’École nationale des Arts Décoratifs à Paris, où son ami Lucien Weil s’était inscrit l’année précédente. C’est probablement à cette époque que se forge définitivement sa volonté de s’installer dans la capitale pour suivre une véritable formation artistique.

 

Libéré des obligations militaires en avril 1923, il revient en Alsace mais pour peu de temps : en 1924, il obtient une bourse départementale qui lui permet de passer le concours d’entrée à l’École des Beaux-Arts de Paris (EBA). Robert Plantey le soutient dans cette démarche. Reçu élève à titre temporaire le 15 mai 1924, il intègre l’atelier de Jean-Pierre Laurens, comme Lucien Weil qui a réussi le concours d’admission en même temps que lui.

 

Six mois après, il décroche sa première récompense : le concours de Paysage. Ce succès valide son admission définitive à l’EBA (15 octobre 1924). Grâce à l’appui de Robert Plantey, la SIM lui octroie une bourse pour l’aider à financer ses études.

Portrait de jeune femme
Huile sur toile, 1927
Dimensions (cm) : h : 55,6 ; l : 46
Collection particulière

©Philippe Dupas

C’est à la même période qu’il rencontre sa future épouse, Marie Huguet, alors qu’elle est en vacances en Alsace. Issue d’une famille plutôt aisée du bourg de Champlitte, en Haute-Saône (son père est négociant en vin), elle sera sa muse, tandis que Champlitte deviendra plus tard, pour le peintre et sa famille, un refuge dans les moments impécunieux et difficiles.

Les Beaux-Arts de Paris

“Je sentis naître en moi la volonté et la certitude d’aller un jour à Rome. Je travaillai.”

Moi-Même
Huile sur toile, 1924
Dimensions (cm) : h : 39 ; l : 30,5
Collection particulière
©René Barsot

L’artiste a réalisé plusieurs autoportraits au fusain et à l’huile au début des années 20. Dans celui-ci, il se montre sensible aux effets du clair-obscur qui est encore la manière de son maître J.-P. Laurens à cette époque. Le peintre s’en détachera assez rapidement, comme en témoigne le tableau conservé au Musée des Beaux-Arts de Mulhouse (Mon portrait), peint vers 1925.

Le jeune Alfred Giess trouve à l’école un terreau fertile pour développer son talent et ses ambitions. Il est à peine entré que déjà, il se fixe comme horizon la réussite ultime des études aux Beaux-Arts : décrocher le Grand prix de Rome de peinture et, avec lui, le séjour de trois ans à l’Académie de France à Rome.

Son maître d’atelier, Jean-Pierre Laurens, prône le retour à une certaine forme de classicisme fondé sur les leçons du peintre Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867) : serrer la forme et la composition, chercher la pureté de la ligne, le rythme, l’équilibre. D’autres maîtres des Beaux-Arts, comme Louis Roger - dont Alfred Giess fréquentera brièvement l’atelier - et Robert Poughéon contribuent également à ce renouveau.

Influencé par les grands maîtres que le peintre découvre au Louvre - une de ses passions -, Alfred Giess assimile rapidement les valeurs esthétiques prônées par J.-P. Laurens. Ainsi qu’il l'exprime un peu plus tard, “[..] ce sont les sculpteurs de la Grèce antique qui sont mes maîtres. Et avec eux, les Raphaël, les Michel Ange, les Titien de la Renaissance italienne. Enfin les romantiques : lngres, Delacroix et Chassériau.

LE PRIX DE ROME

Créé en 1663 pour permettre aux jeunes gens les plus prometteurs de compléter leur éducation à Rome au contact des œuvres de l’Antiquité et de la Renaissance italienne, le prix de Rome, décerné par l’Académie des Beaux-Arts, était aussi la voie royale vers une carrière prestigieuse. Les lauréats étaient en effet assurés de bénéficier d’achats et de commandes, publiques et privées, et étaient amenés à jouer un rôle majeur dans les instances artistiques officielles (Académie des Beaux-Arts, École des Beaux-Arts, fondations, comités d’expositions…).

Le prix - un pour chacun des beaux-arts : peinture, sculpture, architecture, gravure, musique… - était décerné à l’issue d’un concours qui s’étendait sur plusieurs mois. Pour la peinture, une première sélection se faisait sur la réalisation d’une esquisse à partir d’un sujet imposé, mythologique ou historique. Les candidats sélectionnés devaient ensuite peindre un premier tableau de petit format. Enfin, les finalistes “entraient en loge”, c’est-à-dire qu’ils s’isolaient pendant plusieurs semaines pour travailler dans le plus grand secret sur un tableau dont le sujet était libre ou imposé selon les années.

 

Alfred Giess raconte ainsi le concours de 1929 : “Nous étions 200 concurrents à la première épreuve, qui consiste en une esquisse, puis 20 pour la seconde qui est  - toujours d’ailleurs -  un nu masculin. Enfin nous restions 10 concurrents pour la compétition finale et entrions en loge en mars dernier, avec le sujet “L’Adieu”. Soixante-dix-huit jours plus tard, nous sortions de loge.”

Le Grand prix ouvrait droit à une pension pour un séjour d’étude de trois ans à la villa Médicis à Rome. Des prix étaient aussi accordés aux finalistes suivants, sans être assortis de bourse d’étude.

Le concours pour le prix de Rome a été supprimé par André Malraux en 1968. La villa Médicis accueille toujours des pensionnaires mais ils viennent d’horizons plus divers, pour des séjours plus courts, et sont désormais sélectionnés sur dossier.

Le jeune homme travaille avec ardeur et dès 1925, se distingue dans les concours de l’école, figures imposées du cursus des Beaux-Arts.

Demi-figure féminine
Huile sur toile, sd, vers 1925
Dimensions nc
Collection particulière
©Arnaud Bel

En formation dans l’atelier de Jean-Pierre Laurens, Alfred Giess pratique l’étude de l’anatomie, exercice d’entraînement visant à la préparation au concours du Torse qu’il remportera en mars 1927. La demi-figure féminine, ou torse féminin, est peinte d’après modèle vivant.

Demi-figure masculine
Huile sur toile, sd, vers 1925
Dimensions (cm) : h : 81; l : 54
Collection particulière
©Philippe Dupas

Cette étude de torse masculin a été réalisée dans le même contexte que le demi-torse féminin.

En 1926, il enchaîne les récompenses⁠  ; son ascension rapide et prometteuse lui vaut de recevoir la Grande médaille d'émulation pour l’année scolaire 1925-1926. En avril, il expose pour la première fois au Salon des Artistes Français et décroche une médaille d’argent pour La Visitation   . Surtout, il frôle son rêve : le 17 juillet, il est classé second (“Premier Second Grand Prix”) au concours du prix de Rome pour son tableau Les pèlerins d’Emmaüs   , tandis que Lucien Weil se classe troisième. Le Grand prix n’est pas décerné cette année-là.

1927 s’annonce sous les meilleurs auspices pour le jeune peintre. Au printemps, déjà lauréat de deux concours aux Beaux-Arts⁠   , il se classe premier à l’issue des épreuves préliminaires du concours du prix de Rome. Mais lorsqu’après des mois de labeur intense, le 22 juillet 1927, il en découvre les résultats définitifs, sa déception est grande : le jury n’a décerné aucun Grand Prix pour la deuxième année consécutive et il ne figure même pas parmi les récompensés. Annoncée le même jour, sa réussite au concours de la fondation Stillman - une bourse de mobilité, qui lui permettra de voyager en Italie - apparaît comme une maigre consolation.

Portrait de Madame Giess enceinte
Huile sur toile, 1928
Dimensions nc
Collection particulière
©Arnaud Bel

Le lendemain du jugement du concours de Rome, cinq des dix finalistes, mécontents eux aussi, se joignent à lui pour décrocher leur tableau de l’exposition qui accueille les travaux des logistes. Cet acte de rébellion musclé - on dit qu’un coup de poing rencontra malencontreusement le nez du gardien de l’école - leur coûtera cher : ils sont exclus définitivement du concours. Pour Alfred Giess, la sanction tombe le 5 septembre 1927, le jour même où il épouse Marie Huguet.

Si la punition est finalement levée en janvier 1928, il n’est pas autorisé à se présenter au concours dont les artistes mariés sont exclus.

De surcroît, lui et son épouse attendent leur premier enfant.

Sélectionné par J.-P. Laurens pour participer au concours Roux de l’Académie des Beaux-Arts, l’artiste en gagne le deuxième prix en octobre. Par un heureux concours de circonstances, il peut à nouveau espérer remporter le prix de Rome l’année suivante : en effet, un arrêté du Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts publié le 30 juillet 1928 autorise désormais la candidature des artistes mariés. Toutefois, l’âge limite des candidats est désormais fixé à 27 ans révolus au 1er janvier. L’année 1929 sera donc pour lui celle de la dernière chance.

Le peintre travaille d’arrache-pied. En avril 1929, il est en tête du concours de Rome dont le sujet imposé est "les Adieux". Le même mois, il décroche la médaille d’or du Salon des Artistes Français ainsi que le prix James Bertrand pour Pastorale et il est lauréat de la fondation Chenavard.

Pastorale
Huile sur toile, 1929
Dimensions nc
Collection particulière
©Arnaud Bel
Médaille d’or au Salon des Artistes français de 1929

Étude pour Pastorale
Huile sur toile, sd, vers 1929
Dimensions (cm) : h : 54 ; l : 65
Collection particulière
©Philippe Dupas

Enfin, le 5 juillet 1929, c’est la consécration tant attendue : le jury du concours de Rome lui décerne le Grand Prix pour L’Adieu.

Il est alors l’un des artistes les plus titrés de sa génération.

Les lauréats du prix de Rome de peinture 1929 en compagnie de Jean-Pierre Laurens.

Archives de la famille (1929)

Photographe inconnu
De gauche à droite : Jean-Pierre Laurens, Georges Cheyssial (Deuxième second grand prix), Alfred Giess (Premier grand prix), Gabriel Genieis (Premier second grand prix).

L'artiste en résidence(s)

Le séjour à la Villa Médicis (14 janvier 1930 – 30 avril 1933)

Yvonne au bonnet napolitain, étude
Huile sur carton, sd, vers 1930-1931
Dimensions (cm) : h : 33 ; l : 28
Collection particulière

©Adama Dolo

Yvonne, tête de profil
Huile, papier marouflé sur carton, 
1931
Dimensions (cm) : h : 28 ; l : 23
Collection particulière
©J.-L. Langrognet
Envoi de Rome

Alfred Giess arrive à Rome accompagné de sa femme Marie et de leur fille Yvonne, âgée de presque deux ans (un second enfant, Françoise, naîtra en 1931). Exceptionnellement, sa famille est logée avec lui à la villa Médicis.

 

Parmi les pensionnaires, il fréquente surtout le sculpteur Félix Joffre, rencontré à l’école des Beaux-Arts, et sa compagne Marthe, avec lesquels les Giess entretiendront toute leur vie une profonde amitié ; le peintre Nicolas Untersteller, autre condisciple de l’École des Beaux-Arts ; l’architecte Jean Niermans, dont il fera le portrait en 1933 (aujourd’hui au Musée des années 30, à Boulogne-Billancourt) ; ou encore le graveur Robert Cami.

Le séjour prolongé à Rome permet à l’artiste d’approfondir les leçons de son précédent voyage dans la péninsule italienne, à la fin des années vingt. Se conformant à l’usage qui incite les pensionnaires à se déplacer dans les grands foyers artistiques aux sources de l’art occidental, il se rend également en Grèce depuis l’Italie et visite Athènes.

Yvonne à l’Orange
Huile sur toile, sd., hiver 1930-31
Dimensions (cm) : h :115 ; l : 65
Collection particulière
©J.-L. Langrognet
Envoi de Rome

Enfant au chapeau rouge
Huile sur toile, daté 1933-1934
Dimensions (cm) : h :72 ; l : 58,8
Collection particulière
©J.-L. Langrognet
Ce portrait d’enfant, probablement commencé à Rome, a été achevé à Champlitte avant le départ du peintre en Espagne en 1934. 
L’artiste et sa famille y passaient régulièrement leurs vacances.

Pour satisfaire aux conditions de ce séjour et témoigner de l’avancée de ses travaux, le peintre envoie chaque année des œuvres à l’École des Beaux-Arts (les envois de Rome). Femme et enfants en sont souvent les modèles inspirants. Il en réalise des portraits et les soumet à la pose quotidienne pour créer de grandes compositions telles que Maternité (1930)   , qui lui vaut le prix Leguay - Lebrun de l’Académie des Beaux-Arts, L’Oiseau mort, ou d’autres sur le thème de l’atelier comme Quiétude, Intimité à l’atelier, Mon atelier à Rome (1933). Ce dernier tableau est acheté par l’État.

L’artiste répond aussi à des commandes de portraits.

Mère et enfant, étude

Huile sur toile, sd, vers 1929
Dimensions (cm) : h :70 ; l :50
Collection particulière
©A.-M.C. Lemaire
Les études réalisées servent plusieurs fois à l’artiste, constituant une sorte de fonds disponible à la création d’importantes compositions. Celle-ci a pu servir à la Pastorale, à Maternité ou encore à L’Oiseau mort.

L’oiseau mort
Huile sur toile, 1932
Dimensions (cm) : h : 95 ; l : 96
Collection particulière
©Philippe Dupas
Envoi de Rome

Quiétude
Huile sur toile, 1931
Dimensions (cm) : h :132 ; l : 255
Collection particulière
©Philippe Dupas
Envoi de Rome
Marthe, la compagne du sculpteur Félix Joffre, grand ami d’Alfred Giess, a posé pour la tête du modèle.

Étude pour Quiétude : enfant nu endormi, pieds et mains
Fusain sur papier, 1931
Dimensions (cm) : h: 63 ; l :47
Collection particulière
©J.-L. Langrognet

Étude pour Quiétude : jardins de la villa Médicis
Huile sur contreplaqué, sd, vers1931
Dimensions (cm) : h : 39 ; l :76
Collection particulière
©J.-L. Langrognet
Cette étude pour l’arrière-plan du tableau Quiétude montre l’un des ateliers d’artiste donnant sur les jardins de la villa Médicis.

Intimité à l’atelier.
Huile sur toile, 1933
Dimensions (cm) : h : 173 ; l : 101
Collection particulière
©Philippe Dupas
Envoi de Rome

Étude pour Intimité à l’atelier, enfant nu regardant un livre
Huile sur toile, 1932
Dimensions (cm) : h : 39,5 ; l : 42
Collection particulière
©A.-M.C. Lemaire

Françoise au tablier bleu
Huile sur toile, sd, vers 1933
Collection particulière
Dimensions (cm) : h :24; l : 33
©J.-L. Langrognet
Ce portrait de Françoise est tout ce qui subsiste, avec celui de sa soeur Yvonne, du tableau Femme debout avec deux enfants qui fut découpé par le peintre.

Parfois, l’idée peine à s’incarner. Le peintre doute. Intransigeant avec lui-même, il détruit ainsi ce grand portrait de famille – Femme debout avec deux enfants - dont il ne conserve que les têtes d’enfants sous forme de portraits. Des photographies, des études de figures au graphite et une esquisse peinte témoignent de son projet initial.

Deux études au crayon pour Femme debout avec deux enfants
Graphite sur papier, 1933
Dimensions (cm) :
h : 69 ; l : 48 / h : 69.5 ; l : 47
Collections particulières
©J.-L. Langrognet

Le peintre en famille dans son atelier à Rome
1933
Archives de la famille, photographe inconnu.

En arrière-plan le tableau en cours d’exécution Femme debout avec deux enfants qui sera détruit par le peintre, insatisfait de son travail. Seuls seront conservés les portraits des deux fillettes.

Son travail reste sur la voie tracée par sa formation aux Beaux-Arts, comme en témoignent l’esprit ingresque des portraits de Mère et enfant et la grande composition de Quiétude.

L’attention qu’il porte à la composition par le dessin, par la ligne, par le rendu des carnations et des subtils modelés, confère à son œuvre une grande singularité.

Le séjour à la Villa Médicis s’achève en avril 1933 et le peintre et sa famille rentrent à Paris. Comme c’est l’usage chez les pensionnaires de Rome, il pose sa candidature à une bourse d’étude pour une autre résidence de l’Académie de France à l’étranger, la Casa de Velázquez à Madrid. Elle lui est accordée en juillet : il sera donc l’un des onze membres de la 7e promotion d’artistes résidents de la Casa de Velázquez (1934-1935).

En attendant le départ prévu pour l’automne 1934, il expose au Salon les travaux réalisés en Italie et continue d’assimiler les leçons de Rome.

Le séjour à la Casa de Velázquez (automne 1934 - printemps 1935)

Le peintre et son épouse partent à Madrid en octobre 1934, sans leurs enfants, laissés à Champlitte à la garde des grands-parents.

Malgré la tranquillité précaire qui règne en Espagne, les pensionnaires trouvent dans ce palais récent, à peine achevé à l’époque, un environnement propice au travail et une ambiance agréable. Le règlement, moins strict qu’à la villa Médicis, leur permet d’organiser régulièrement des excursions automobiles pour visiter, seuls ou en groupe, les hauts lieux de l’art et de l’architecture du pays (Avila, Grenade, Séville, Salamanque, Tolède) et pour découvrir les paysages espagnols. Alfred Giess profite largement de cette liberté pour parcourir le pays.

Paysage d’Estramadure
Huile sur bois, 1934
Dimensions (cm) : h : 56,8 ; l :71,2
Dépôt Centre national des arts
plastiques, 1938
D-88.RP.136
©Musée Unterlinden

Paysage de la Sierra de Guadarrama
Huile sur toile, sd, vers 1934-1935
Dimensions (cm) : h : 43 ; l : 54,5
Collection particulière
©Philippe Dupas

L’Alhambra
Lavis d’encre sur papier, sd, 1934-1935
Dimensions (cm) : h: 45 ; l: 27 / sous verre
Collection particulière
©Philippe Dupas

Le contact avec les œuvres des grands maîtres espagnols, la lumière et les paysages d’Espagne vont influer sur sa manière. L’atelier est aussi dans la nature. Les paysages sont parfois rapidement brossés pour saisir la lumière. Le lavis et l’aquarelle, techniques bien adaptées aux déplacements, tiennent une place plus importante dans son registre.

Petite gitane de Castille
Huile sur toile, 1934
Dimensions (cm) : h : 72 ; l : 60
Collection particulière
©Laurent Meunier

Le peintre et ses modèles
Madrid, 1934 - 1935
Archives familiales, photographe inconnu
Le peintre pose avec deux de ses modèles, dont sa femme Marie. En arrière-plan, à gauche, un tableau en cours de réalisation. Le même nu figure seul dans le tableau Vénus espagnole présenté au Salon des Artistes Français en 1936 puis à la Galerie Charpentier en 1937.

Comme à Rome, il peint des portraits, parfois à la commande. Il réalise également de grandes compositions mettant en scène nus et figures comme La Vénus espagnole.

De Madrid à Champlitte

Alfred Giess et son épouse rentrent en France à l’été 1935 et s’installent de nouveau à Paris. Le peintre valorise ses travaux d’Italie et d’Espagne par une série d’expositions dont la plus importante, celle de la Galerie Charpentier, en janvier 1937, est saluée par la critique. Il s’agit de sa première exposition parisienne personnelle.

 

On le sollicite pour participer à la décoration du pavillon du Thermalisme à l’Exposition universelle qui se tient à Paris entre mai et novembre 1937 ; il y réalise un panneau intitulé La Montagne. Signe de sa notoriété croissante, il est élu en 1938 membre du Jury du Salon des Artistes français, section de peinture. Cette ascension vers une carrière officielle, cursus classique des Grands prix de Rome, est interrompue par la Seconde Guerre mondiale. Lorsque l’artiste est démobilisé au début de l’été 1940, il rejoint sa famille qui s’est réfugiée à Champlitte.

Après les années parisiennes et les séjours romain et madrilène, ce nouveau chapitre constitue une certaine forme de rupture.

Portrait de Robert Fernier
Huile sur toile, 1942
Dimensions (cm) : h :61 ; l : 50
Association Robert Fernier
©Pierre Guenat
Par autorisation de l’Association Robert Fernier
www.robert-fernier.org

Les liens avec l’environnement professionnel parisien sont distendus – même si en 1942, il devient membre du jury du prix de Rome - les déplacements compliqués. Il envoie néanmoins des toiles au Salon des Artistes français ainsi qu’à Mulhouse et Colmar.

 

A l’invitation du peintre franc-comtois Robert Fernier, il participe au Salon des Annonciades à Pontarlier (Doubs). Il y exposera chaque année jusqu’en 1949 et y reviendra régulièrement par la suite.

L’absence d’atelier dans la maison de famille laissée à disposition par ses beaux-parents, petite et peu éclairée, l’amène à modifier sa pratique.

 

Hormis pour des commandes, le peintre ne réalise quasiment plus de grandes compositions. Il travaille sur le motif comme il le faisait en Espagne, parcourant par tous les temps la campagne franc-comtoise qu’il peint avec bonheur.

Rivière
Huile sur toile, 1941
Dimensions (cm) : h : 46 ; l : 37
Collection particulière
©Adama Dolo

Route de Champlitte-la-Ville, paysage enneigé
Huile sur toile, 1944
Dimensions (cm) : h : 60; l : 72
Collection particulière
©René Barsot

La famille de l’artiste
Huile sur toile, 1946
Dimensions (cm) : h :65 ; l :81
Collection particulière
©René Barsot

La leçon de piano
Huile sur toile, 1943
Dimensions (cm) : h :65 ; l :81
Collection particulière
©J.-L. Langrognet

La toilette
Huile sur toile, 1948
Dimensions (cm) : h :139 ; l : 112
Collection particulière
©Pierre Guenat

La simplicité de sa vie quotidienne à Champlitte l’inspire. Il travaille toujours le portrait, le nu, le bouquet, la nature morte, dans laquelle il s’attache à modeler ses sujets avec la même sensualité que ses figures.

Yvonne en alsacienne
Huile sur toile, 1945
Dimensions (cm) : h :61 ; l :50
Collection particulière
©Pierre Guenat

Françoise au bouquet
Huile sur toile, 1945
Dimensions (cm) : h : 65; l : 81
Collection particulière
©Philippe Dupas

Fruits, flûte de champagne et service de table
Huile sur toile, 1947
Dimensions (cm) : h :54 ; l : 81
Collection particulière
©Philippe Dupas

Nature morte au vanneau et fruits d’automne
Huile sur toile,1948
Dimensions (cm) : h : 38 ; l : 61
Collection particulière
©Philippe Dupas

Après la guerre, Alfred Giess peut voyager librement entre Paris, l’Alsace et Champlitte, où il réside principalement jusqu’en 1953. Le bourg natal de sa femme tiendra toujours une place particulière dans son cœur.

En 1947, il donne corps à cet attachement en proposant à la Confrérie de saint Christophe de réaliser une fresque a fresco pour la chapelle saint Christophe, dans l’église du village. Le thème en est l’un des épisodes du martyre du saint : la sagittation et le miracle des flèches.

La fresque Martyre de saint Christophe : panneau central
Fresque, 1947
Dimensions (cm) : h : 465 ; l max : 350
Église Saint-Christophe, Champlitte (Haute-Saône)
©René Barsot

L’influence de la peinture du Quattrocento et de la peinture étrusque est présente dans la grande composition qui prend place face à l’autel de la chapelle. Deux panneaux logés dans les écoinçons (h = 2,75m ; l = 1,10m à la base), aujourd’hui très dégradés, représentent la décollation et la montée de la tête vers les cieux.

Deux esquisses pour la fresque Martyre de saint Christophe : décollation et élévation de la tête du saint.
Gouache sur papier, 1947
Dimensions (cm) : h : 50,6 ; l : 65 / sous-verre
Collection particulière
©J.-L. Langrognet

Ces fresques étaient destinées aux écoinçons droit et gauche de chaque côté de la fenêtre de la chapelle Saint-Christophe.

Pour ce projet, l’artiste a fait de nombreuses esquisses et travaux préparatoires et testé la technique de la fresque sur les murs de l’ancien entrepôt de vin de ses beaux-parents, au rez-de-chaussée de leur maison. D’autres études appartenant probablement à la même décennie témoignent de ses recherches sur le thème du martyre.

Tête d’archer, étude pour la fresque Martyre de saint Christophe
Fusain sur papier calque, 1947
Dimensions (cm) : h : 36,5 ; l :27,5
Collection particulière
©Pierre Guenat
Ce dessin préparatoire était destiné à la composition du panneau central

de la fresque.

Esquisses pour le panneau central de la fresque Martyre de saint Christophe
Fresque, 1947
Dimensions (cm) : h : 465; l : 350
Collection particulière
©J.-L. Langrognet

Le martyre de saint Sébastien

Esquisse peinte
sd, vers 1942-1945 ?
Huile sur papier
Dimensions (cm) : h : 48; l : 64
Collection particulière
©J.-L. Langrognet

La sauvegarde de la fresque de l’église de Champlitte, aujourd’hui en péril, est une action prioritaire de l’Association Alfred Giess qui a engagé depuis plusieurs années des démarches auprès des différents acteurs concernés en vue de sa consolidation-restauration.

Pour voir d’autres esquisses et photographies de la fresque, suivez le lien :

Sauver la fresque

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Remerciements

 

Un grand merci à tous les personnes et institutions qui ont rendu cette exposition possible :

Les membres de l'Association Alfred Giess

Fanny Bel-Giess

Christine Cogniez

Anne Colin

Sophie Colin

Frédérique Giess

A.-M. Catherine Lemaire

Dominique Monget

Les collectionneurs privés et les institutions

qui ont accepté de mettre leurs œuvres et leur documentation à disposition

Photographie & graphisme 

Carole Baisson, René Barsot, Arnaud Bel, Adama Dolo, Philippe Dupas, association Robert Fernier,

Pierre Guenat, J.-L. Langrognet, A.-M. Catherine Lemaire, Laurent Meunier, Musée Unterlinden (Colmar)

Mise en ligne et design de l'exposition

Julie Colin

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